LES ÂMES INCLINÉES
En regardant ma mère sourire, ce qui a présent ne lui arrive que très rarement de la maladie qui la prive de nous ..
Nous ne sommes que trop petits dans l’ensemble des choses, lorsque nos yeux ont moins d’ardeur même si autant de lumière, que nous nous laissons ignorer tout en restant avec vous.
Quand le reste des ans n’est qu’une suite d hivers, que la jeunesse s’enfuit pour ne plus revenir et que nous ne pouvons que nous séparer de nos rêves et penser à un adieu sans retour.
Depuis longtemps nous vivons sur le rivage en craignant d’être importuns occupés à parer nos âmes, nourrir nos esprits d’un solide savoir quant aux choses qui sont vraiment essentielles dans la vie.
Les yeux poignants dans la fuite des jours nous attendons résignés les heures lentes, la fatigue dans les os et pleins de trous vides de mémoire comme les jardins d’autrefois, ces pierres précieuses que sont nos souvenirs.
Nous nous souvenons sans nous battre, le regard fugace, la faiblesse inquiète, même si au déclin des jours nous tenons tête, nous nous savons au crépuscule de vivre, des spectres vivants.
Le miroir trop vrai nous oblige à la franchise nue et à la simple bonté quant aux sillons que l’âge a creusé, à notre jeunesse ravie, qui nous laisse sur une route parallèle, les regards errants sur l’horizon.
Nous ne sommes plus que ces vieillards infortunés que des gens sombres emporteront encore fiers de leurs souffrances, ces hommes et femmes de douleurs dans leurs jours chancelants.
Dans le reflet pâle des derniers jours de novembre, en cette heure qui marche sans bruit je ne suis plus qu’une petite vieille au cœur d enfant qui a vécu une vie amère, dont l’angoisse a fait taire la voix dans la sombre horreur de la décrépitude.
Dans leurs grands yeux ou l’âme transparaît, le poids accablant de ces vies dont les nuits se tordent de la peur du noir, ils voudraient mourir comme on s’endort sans ces exécrables douleurs.
Le soir est un voile sombre, la nuit de nos erreurs lorsque la maladie l’extrême fléau de l’âme rajoute de l’ombre sur nos regards, ferment nos yeux aux clartés du jour alors que nous voudrions courir avec nos printemps.
Nos mains fripés ne s’inquiètent plus des plis droits des rideaux, de nos lits étriqués, nous ne voyons plus nos dents jaunies par le tartre, nos cheveux mousse verdis, voulant juste vieillir sans oublier nos rides, résister à l’abandon lugubre et frémissant, même si nous n’ignorons pas que la nature mûrit ses blés.
La frustration du silence, ces baisers appuyés sur la trace de nos larmes, qui deviennent des amis inconnus font de nous de sombres ennuis au front baissé l’œil sec et le visage blême fuyant la lumière, qui oublient leurs sacrifices sans plainte ni regret.
Les rayons de l’aube en leurs âmes d’enfants éclaireront longtemps encore la vie qui continue en nous malgré tout....
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