ENTRE FERVEUR ET ESPOIR...

 L'urgence du quotidien faisait que bien souvent ta voix se faisait dure, ta main trop souvent leste même si tu étais une mère qui donnait sans compter, de saisir la possibilité qui t'était donnée de vivre ailleurs que dans la misère à laquelle ton destin te destinait.

Tu as su vaincre un ciel qui se refermait sur toi, une vie insoupçonnée de souffrances, tout en canalisant une colère intrinsèque quant à une existence terne, une enfance, miséreuse, sacrifiée, un destin qui se dessinait mauvais, tel un défi sans cesse renouvelé.

Mais tu étais jeune de coeur et d'illusions, capable de prendre tout en charge, t'oubliant tout le temps comme par réflexe, même dans les situations extrêmes, butant contre les larmes, l’énervement et le découragement, nous savons que tu ne pouvais pas être aussi une mère angélique.

Il s'agissait pour toi de construire une famille, tout en étant constamment poussée dans tes retranchements, pour cela tu n'as eu que l'attachement primitif et animal pour nous aimer, et oublier tes nuits hachées, et toujours sans la moindre source de ressourcement.

Tu as quand même su partager nos doutes et adoucir nos peines, en n'écoutant jamais tes limites, en te sacrifiant inlassablement, apprenant à ton corps défendant l'abnégation, la délicatesse et la patience, pour aussi nous offrir la douceur fugitive de quelques instants de bonheur.
      

Vulnérable mais forte, dotée d'une incroyable rage de vivre qui t'a fait dépasser tes descentes aux enfers, tu as su trouver ton bonheur dans le sacrifice volontaire, qui nécessitait un coeur bien grand, tant il s'agissait surtout de mettre en parenthèse ta vie.

Tu as été celle qui s'est sacrifiée de trop savoir aimer, qui n'a pas eu le temps de nous écouter mais d'entendre nos désirs, nos aspirations à nous intégrer, tout en nous fixant des limites et des interdits qui nous préparaient aux frustrations et exigences à venir.

Entre ferveur et espoir, malgré le désarroi qui côtoyait l'urgence, tu as satisfait à nos exigences du quotidien tout en punissant nos transgressions, afin que nous ne soyons pas des frustrés désorientés, et que nous sachions dépasser la honte que procure la misère matérielle.

Malgré tous les trésors de connaissances non partagés, la tare invisible de illettrisme, tu as su faire preuve de présence et d’attention pour embrasser la diversité de nos ressentis, afin que nous n'ayons jamais le sentiment malheureux de nous éloigner des nôtres.

Il nous a fallu passer par toutes les étapes de la vie pour comprendre, tenter de deviner le puits de courage que tu as été, pour avancer en occultant la femme en toi, la vie qui n'attend jamais personne, l'histoire de la tienne au quotidien qui a été davantage de l'héroïsme.